-60%/-70% ! : Ce n’est pas le montant d’une réduction sur un voyage discounté par Voyage Privé, mais c’est actuellement le volume de perte de clients des Tours Opérateurs français en Tunisie, en Egypte, voire même au Maroc.
Le monde semblant vaste et les réalités économiques ne s’embarrassant pas toujours de dimension poétique, les opérateurs touristiques ont bien tenté un repli stratégique vers des contrées moins hostiles… mais malheureusement ou heureusement, cela s’est avéré impossible.
En effet, le réalisme arithmétique nous démontre que les 300 000 chambres perdues de la Tunisie et du Maroc ne se retrouveront pas dans des destinations nouvelles, qui n’ont pas le début d’une réalité en matière de capacité (le Cap Vert par exemple ne représente qu’un peu plus de 1000 chambres…). Même constat pour les gros porteurs qui sont déjà surinvesti et donc n’offrent pas les mêmes caractéristiques de prix, ou encore des destinations injustement assimilées à un mouvement qui pourtant ne les concerne pas (ex : la Turquie).
Ainsi, un souffle nouveau doit animer l’action de nos grands voyagistes, en résonance au formidable mouvement d’émancipation des peuples arabes.
Mettre des prix sur des maux fussent-ils sous le vocable de la promo, quand bien même le tout serait emballé par des bons mots, ne pourra faire oublier les cahots et les sanglots, et dès lors la seule voix de la raison sera d’accompagner les revendications sans compassion, mais avec compréhension, négociation et détermination : « contre mauvaise fortune bon cœur »…
Un nouveau modèle plus serein et plus équanime
Les mouvements actuels sont une formidable opportunité pour engager une réflexion sur une refonte des modèles économiques construisant les offres touristiques des grands acteurs européens. Il est urgent de repenser et de proposer un nouveau cadre d’organisation plus propice à transformer les énergies en actions concrètes et positives pour toutes les parties en présence.
C’est probablement la fin du « soleil à petits prix », souvent réalisé au détriment des conditions vécues localement pour proposer un nouveau modèle plus serein et plus équanime. Entre les bons sentiments des uns et l’opportunisme des autres, la situation ne peut se contenter d’un « on verra bien », peu propice à créer un élan mobilisateur général.
La cause n’est pas entendue, rien n’est définitif puisque pas encore défini et si l’avenir de ces pays leur appartient, il nous revient de les accompagner sur le chemin de la démocratie et de la dignité individuelle : investir dans l’humain étant sans nul doute le meilleur des rendements.
Dès lors, il conviendra d’accepter voire de dépasser les revendications actuelles des travailleurs de ces pays (15 à 20% de salaire en plus), ce qui représentera une augmentation des prix des packages n’excédant pas 5%. Le tourisme et les touristes peuvent accepter une petite augmentation plus juste si on leur fournit une explication où la plus juste répartition devient un élément de l’équation tarifaire.
Bien sûr, dans l’organisation de cet ordre nouveau, les droits légitimement trouvés (et non re-trouvés) devraient être associés à des devoirs de productivité et de qualité. Plus d’argent, plus d’emplois et plus de considération se transformera à coup sûr en plus de services, d’efficacité et donc de confort pour les clients.
Cette révolution doit servir de point de départ à une évolution du rapport Nord/Sud, et l’exploitation économique doit faire place à des responsabilités politiques et à un sens du service touristique, non comme aliénation mais bien comme une source d’émancipation et de réalisation individuelle prompt à apporter une réponse harmonieuse aux problématiques actuelles, tant de condition, d’immigration, de formation, et plus généralement de satisfaction des recevants comme des reçus, garant d’un nouvel équilibre porteur de valeurs d’avenir où la satisfaction du travail accompli par les populations locales donnera bonne conscience aux voyageurs de l’argent ainsi bien dépensé.
Jean-Pierre Nadir
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